Venise est la ville où tout est possible, où l’on ne doit s’étonner de rien, où, en un mot, les frontières entre le réel et l’imaginaire sont brouillées ; c’est aussi la ville où l’on s’adonne à la passion du jeu, des cartes, aux dés ou au dominos ; le Casino y est un lieu privilégié. Les Vénitiens croient aux vertus des cartes, à celles qui portent bonheur comme la Dame de Pique ou malheur comme le Valet de cœur. Pique mon cœur….
Le carnaval est aussi le symbole d’une séduction masquée, comme dans la vie courante, mais outrageusement magnifiée, et ceci s’inscrit dans un contexte où les diseuses de bonne aventure font fortune et où l’on pratique l’ésotérisme. Omniprésent, il devient métaphore de la passion. La passion du jeu et le jeu qu’est la passion sont interchangeables, et c’est bien ce que vous irez vivre à Venise. Le labyrinthe des ruelles et canaux sera la piste de ce jeu incertain.
La course éperdue
Commencez par la visite incontournable de la Place San Marco, et voyez vos soucis disparaître comme autant de pigeons qui s’envolent. Le bonheur à Venise ne durera peut-être qu’on court moment, mais il sera complet, envoûtant.
Après avoir pris quelques verres au Florian, rendez-vous à la Maison Rubelli pour acquérir quelques masques de circonstance. Puis lancez-vous à l’assaut de cette ville, et rappelez-vous vos souvenirs d’école en jouant à cache cache dans le labyrinthe des ruelles étroites aux murs irréguliers, avec leurs briques moussues, leurs pierres fatiguées, jouant des clairs-obscurs, pour mieux vous sauter au cou lorsque vous vous serez retrouvés, épuisés de cette course éperdue.
Canaux et gondoles
Un peu plus tard, laissez-vous emmener sur une gondole au noir profil, glissant doucement sur une eau apaisante, presque proche de vous engloutir dans un rêve sans fin. « La gondole avance d’un mouvement insensible ; on est couché, on se laisse aller tout entier, esprit et corps. Un air moite et doux arrive aux joues.
On voit onduler sur la large nappe du canal les formes rosées ou blanchâtres des palais endormis dans la fraîcheur et le silence de l’aube ; on oublie tout, son métier, ses projets, soi-même; on cueille, on savoure, comme si tout d’un coup, affranchi de la vie, aérien, on planait au-dessus des choses, dans la lumière et dans l’azur. » Vous en manquerez pas, au passage, d’avoir une pensée pour les chats qui, d’une rive à l’autre, se dissimulent sous les coussins pour aller faire leurs courses à la Pescheria, le marché aux poissons.
Miroirs et chandelles
Plus tard, cette fois vraiment déboussolés et en même temps comme conscient au sein de votre propre rêve, vous vous statufierez au-dessus d’un pont, vous regardez s’écouler l’eau, et vous croirez voir les yeux de votre grand amour s’y refléter ; toute la ville lacustre sera le miroir de vos sentiments, et votre main, sans que vous en rendiez compte, s’attachera à celle qui vous attend, votre buste, presque dans un état somnambulique, se tournera, et vos lèvre se frôleront, encore un peu surprises… Qui est ce jeune homme ? Qui est cette belle inconnue ? Toute rencontre à Venise vous apparaîtra comme une première fois, et c’est là toute la magie de cette ville.
Sanctifiez votre amour par un concert aux chandelles en hommage au Maestro Vivaldi en l’Eglise de la Pietà, puis tentez de rencontrer la Traviata dans les salons du fameux Hôtel Danieli. Et ne revenez jamais dans votre pays, mais restez sous le charme, éternellement, de son beau masque de courtisane, en jouissant de chaque seconde pour célébrer jusqu’au bout le carnaval de l’existence.